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Veterinary nurses , une profession en crise outre-Manche

Le management des équipes dans la clinique doit mettre en place une communication adéquate et des objectifs réalistes pour les veterinary nurse en leur permettant de développer et renforcer leur autonomie et leurs responsabilités.

© Santypan-StockAdobe

Alice LAURENS

Exercice

Au Royaume-Uni, de nombreux veterinary nurses, équivalents des ASV, quittent la profession. En cause : des salaires insuffisants, un management inadéquat et un travail affectant vie personnelle et bien-être. Une meilleure reconnaissance et valorisation de leur rôle au sein de la clinique, associées à une rémunération supérieure, pourraient contribuer à augmenter le taux de rétention au sein de la profession.

Depuis plusieurs années, la communauté vétérinaire britannique fait face à une pénurie de veterinary nurses (VN), faisant ainsi écho à une situation similaire chez les vétérinaires. Une écrasante majorité d'employeurs1 (91,6 %) affirme rencontrer de grandes difficultés à recruter des VN expérimentées, et notamment des Registered Veterinary Nurses (RVN).

Ces dernières ont un statut particulier et recherché. L'obtention des qualifications requises par le Royal College of Veterinary Surgeons (RCVS) leur permet d'être inscrits au Register for Veterinary Nurses. Cette accréditation officielle et reconnue est une preuve de leurs compétences et de leur formation continue.

Conscients des difficultés que traverse la profession, le RCVS et la British Veterinary Nursing Association (BVNA) ont mis en place conjointement en 2015 une initiative appelée VN Futures Project afin de soutenir les VN et faire de leur métier une carrière viable et désirable.

Salaires insuffisants et manque de reconnaissance

Malgré de nombreuses initiatives, la situation ne semble pas connaître d'amélioration pour le moment, cette dernière ayant en effet été exacerbée par les crises successives du Brexit et de la pandémie de Covid-19.

En 2019, près d'une VN sur quatre affirmait vouloir quitter la profession d'ici les cinq prochaines années (hors départ à la retraite), une tendance à la hausse par rapport aux années précédentes2. En cause, des salaires insuffisants et un manque de reconnaissance de leur profession.

Ces deux facteurs sont, depuis 2010, les deux raisons principales évoquées pour quitter la profession. En 2020, le salaire annuel médian d'une VN employée à temps plein 3 est de 25 034 livres (28 640 euros), ce qui correspond à 6 000 livres (6 865 euros) de moins que le salaire moyen des Britanniques.

Faible taux de rétention au sein de la profession

Une étude publiée fin juillet 2022 1 se propose d'analyser les facteurs affectant le recrutement et la rétention des VN au Royaume-Uni. Cette étude présente les résultats d'un questionnaire mené en 2018 auprès d'un échantillon de 1 075 VN. Les résultats de l'étude apportent des éléments de réflexion intéressants sur la situation actuelle, qui devraient permettre de mettre en place les changements logistiques et sociétaux nécessaires pour refaire de la profession de VN une carrière désirable et viable.

De manière générale, les VN changent peu souvent d'emploi. L'équipe, le lieu de travail et les heures de travail sont les raisons invoquées pour rester dans une structure. Cependant, plus d'une VN sur deux (53,8 %) affirme vouloir quitter son emploi d'ici deux ans. Cette tendance est d'autant plus marquée chez les VN récemment qualifiées et avec les niveaux de salaires les plus bas. En cause, des salaires insuffisants, un management inadéquat et une ambiance de travail qui s'en ressent, et un mauvais équilibre entre vies professionnelle et personnelle.

Rester au sein de la profession

La plupart des VN interrogées indiquent vouloir quitter leur employeur actuel mais rester au sein de la profession, que ce soit dans un poste similaire au sein d'une structure vétérinaire (59,6 %) ou dans d'autres fonctions (20,9 %) comme l'enseignement et la formation, ou encore le management de cliniques vétérinaires.

Par ailleurs, près d'une VN sur cinq (19,5 %) affirme vouloir quitter la profession pour changer de métier, prendre des congés ou voyager.

Les VN déplorent le manque de reconnaissance de leur profession et de leur rôle par le grand public et les incivilités récurrentes qui en découlent1. La faible rémunération et le manque d'équilibre entre vie personnelle et professionnelle, affectant leur bien-être et leur santé mentale, jouent également un rôle important dans cette crise sans précédent. Il est important également de souligner que les VN auraient un score de bien-être inférieur à la moyenne nationale pour les femmes4 (il y a 97 % de femmes au sein de la profession).

Plusieurs points d'amélioration1, évoqués par les VN elles-mêmes, permettraient de rendre la profession à nouveau plus attractive et mieux valoriser leur rôle.

Tout d'abord, il est crucial de mettre en place une rémunération plus élevée, incluant de meilleurs bénéfices comme par exemple un congé maternité plus attractif et un financement adapté de la formation continue.

Une profession encore trop méconnue du grand public

Le management des équipes au sein de la clinique doit prendre en compte les besoins de chacun et mettre en place une communication adéquate et des objectifs réalistes pour les VN, tout en leur permettant de pouvoir développer et renforcer leur autonomie et leurs responsabilités au sein de la structure vétérinaire.

Enfin, les VN évoquent l'absolue nécessité d'avoir plus de soutien au sein de l'équipe, notamment via le recrutement de personnel supplémentaire. Ceci permettrait d'optimiser la répartition du travail et de s'assurer que les tâches administratives ne soient pas effectuées au détriment des soins vétérinaires.

1 Hagen JR, Weller R, Mair TS, Batt-Williams S, Kinnison T. Survey investigating factors affecting recruitment and retention in the UK veterinary nursing profession. Vet Rec. 2022;e2078. https://doi.org/10.1002/vetr.2078

2 Robinson D, Edwards M, Akehurst G, Crockett J, Graham K, Martin A. The 2019 survey of the veterinary nursing profession. 2020.

3 Society of Practising Veterinary Surgeons, SPVS Salaries Survey 2020.

4 Morris S, Earl K, Health survey for England well-being and mental health, 2017.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1636

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