Effets indésirables des médicaments vétérinaires chez l'Homme : antiparasitaires et vaccins en tête

Les 24 dossiers d'exposition volontaire à des médicaments vétérinaires correspondent principalement à des ingestions.

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Corinne DESCOURS-RENVIER

Santé publique

L'analyse par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail des données de la base de pharmacovigilance vétérinaire pour l'année 2018 met en évidence 392 cas d'événements indésirables survenus chez des personnes exposées à des médicaments vétérinaires. Dans 93 % des cas, il s'agissait d'une exposition accidentelle à un produit vétérinaire, le plus souvent un antiparasitaire (37 % des cas) ou un vaccin (30 %).

L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a mis en ligne, le 8 juillet, une étude rétrospective portant sur des cas d'exposition humaine à des médicaments vétérinaires associée à une symptomatologie*. Dans le cadre de cette étude, le groupe de travail « Toxicovigilance des intrants du végétal, produits biocides et médicaments vétérinaires » de l'Anses a analysé les dossiers de la base de pharmacovigilance vétérinaire enregistrés en 2018.

Au cours de l'année 2018, 392 événements indésirables survenus chez des personnes exposées à des médicaments vétérinaires ont été enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance vétérinaire.

Les dossiers analysés proviennent de plusieurs sources. S'ils sont très majoritairement issus de la base nationale des cas d'intoxications (BNCI ; 86,2 %), ils peuvent aussi avoir pour origine les firmes pharmaceutiques (13,8 %) ou l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM ; 0,3 %)**.

Le rapport précise que, pour la première fois en 2018, le réseau des centres antipoison et de toxicovigilance vétérinaires (CAPTV) a transmis à l'Anses*** l'ensemble de ses dossiers d'exposition humaine à des médicaments vétérinaires associés à une symptomatologie pour les intégrer à la BNCI.

Une médiane de 31 cas par mois

La répartition mensuelle des cas en fonction de la date de survenue des symptômes est assez régulière au cours de l'année 2018, avec une médiane de 31 cas par mois.

L'âge des personnes concernées varie de 8 mois à 91 ans. Les adultes représentent plus de 90 % des cas et les enfants, moins de 10 %. Les personnes de sexe féminin représentent plus de 60 % des cas.

Les auteurs précisent que la base nationale de pharmacovigilance vétérinaire ne fait pas systématiquement la distinction entre expositions domestiques et professionnelles.

Une très grande majorité d'expositions accidentelles

Le rapport signale majoritairement des cas d'exposition accidentelle aux médicaments vétérinaires chez l'Homme (362 personnes, soit 93 % des cas). Quelques cas d'intoxication médicamenteuse volontaire sont également rapportés (24 personnes, soit 6 %) et dans cinq dossiers (6 personnes, soit 1 %), les circonstances d'exposition sont considérées comme « atypiques » (lire ci-dessous).

En 2018, les principales classes thérapeutiques en cause lors d'exposition accidentelle sont les antiparasitaires (37 %), dont les antiparasitaires externes (27 %) et les endectocides (7 %), les vaccins (30 %) et les médicaments du système nerveux (11 %).

Chez les personnes exposées accidentellement à des antiparasitaires, l'exposition fait le plus souvent suite à des projections cutanées ou oculaires d'antiparasitaires externes.

Une exposition orale peut suivre une projection ou un contact direct (par exemple, avec le capuchon d'une pipette ou un comprimé).

L'Anses constate aussi des cas d'exposition indirecte par contact avec les animaux traités ou, plus rarement, par inhalation.

En dehors des antiparasitaires, les expositions par ingestion sont le plus souvent dues à une confusion entre médicaments (ingestion de comprimés initialement destinés à l'animal par exemple).

Quant aux expositions par injection, elles sont principalement à lier aux vaccins****, même si des cas faisant suite à des injections d'antibiotiques, d'antiparasitaires, d'anesthésiques ou encore d'euthanasiants sont également décrits.

Une trentaine de cas volontaires ou « atypiques »

Les 24 dossiers d'exposition volontaire à des médicaments vétérinaires correspondent principalement à des ingestions (88 %) et, beaucoup plus rarement, à des injections (12 %). Dans ces circonstances, les médicaments vétérinaires sont, dans 80 % des cas, associés à la prise d'autres substances : alcools, antidépresseurs...

Enfin, cinq dossiers rapportent des circonstances d'exposition considérée par l'Anses comme « atypiques » : utilisation d'un médicament vétérinaire à des fins de traitement d'une personne, administration malveillante par un tiers ou encore exposition professionnelle sur une chaîne de fabrication.

Quels médicaments impliqués ?

Les médicaments vétérinaires impliqués dans les cas d'expositions humaines recensés par l'Anses, en 2018, sont principalement destinés aux animaux de compagnie (45 %), aux animaux de production (43 %) et, plus rarement, aux chevaux (4 %). Dans 7 % des cas, il s'agit de médicaments destinés à plusieurs espèces.

Le rapport de l'Anses étudie plus particulièrement les trois médicaments (hors vaccins) ayant fait l'objet de plus de dix déclarations en 2018.

Trente-quatre cas d'exposition humaine au Bravecto spot on ND, antiparasitaire de la classe des isoxazolines, sont rapportés dans l'étude. Il s'agit majoritairement de personnes n'ayant pas respecté les précautions d'emploi préconisées par le fabricant, notamment le port de gants de protection ou ayant tenté de retirer l'embout du spot on.

Ces erreurs d'utilisation ont incité l'Agence européenne des médicaments (EMA) à adapter le résumé des caractéristiques du Bravecto spot on ND, en juin 2018 : les précautions d'emploi pour les utilisateurs ont été reprécisées et des gants jetables sont désormais fournis.

Une diminution du nombre de cas a été constatée suite à ces modifications mais l'Anses préconise de poursuivre la surveillance avant de conclure à leur réelle efficacité.

Quatorze cas d'exposition accidentelle à des médicaments de la gamme Butox ND sont aussi recensés. Le rapport décrit principalement des signes d'irritation cutanée, oculaire ou respiratoire, cohérents avec les propriétés de cet insecticide de la classe des pyréthrinoïdes.

Enfin, onze cas d'ingestion accidentelle de Prascend ND ont été signalés en 2018. Seul médicament vétérinaire contenant du pergolide, il se présente sous forme de comprimés que les personnes ont ingérés accidentellement. Les principaux signes observés sont digestifs, cardiovasculaires, nerveux ou généraux.

Protéger les consommateurs

Même si la majorité des symptômes décrits chez l'Homme sont heureusement bénins, l'Anses souligne l'importance du suivi annuel des données de la base nationale de pharmacovigilance vétérinaire.

En effet, les cas d'exposition humaine aux médicaments vétérinaires étant majoritairement d'origine accidentelle, il est important d'identifier les principales erreurs commises par les utilisateurs de produits vétérinaires et d'y remédier : modifications des notices, communiqués de presse...

* https://www.anses.fr/fr/system/files/ANMV-Ra-ExpoHumaine-MedicamentVeterinaire2018.pdf

** Les données initiales ayant été corrigées pour tenir compte des doublons, le résultat final est supérieur à 100 %.

*** Via l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV).

**** Le rapport de l'Anses précise qu'une étude spécifique portant sur les vaccins est en cours de publication.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1542

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