DNC : « La complémentarité des rôles a permis une réponse rapide et structurée », se félicite le SNVEL

David Quint, président du SNVEL

© Jacques Graf

Exercice

Dès l'annonce des premiers foyers de dermatose nodulaire contagieuse en France, le SNVEL1 s'est mobilisé, aux côtés d'autres acteurs comme la SNGTV2, pour accompagner concrètement les vétérinaires dans la mise en oeuvre de la lutte contre la maladie. Des tensions sont apparues avec certains éleveurs dès les premières opérations sur le terrain. Pour le syndicat, s'il est normal et même souhaitable qu'un débat ait lieu, le temps de la controverse doit venir après la crise, pas pendant.

La Dépêche Vétérinaire : L'apparition de la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) en France a impacté (impacte) lourdement l'activité des praticiens de la région concernée. Quelle a été la nature du soutien apporté aux vétérinaires par le SNVEL1 dans ce contexte ?

David Quint, président du SNVEL : Dès l'annonce des premiers foyers, le SNVEL s'est mobilisé aux côtés de la SNGTV2 pour entrer en contact direct avec le ministère de l'Agriculture.

L'objectif était double : comprendre rapidement la stratégie retenue, s'assurer de sa pertinence à notre niveau et accompagner concrètement les vétérinaires dans sa mise en oeuvre, tant sur le plan logistique qu'administratif.

Nous avons contribué à organiser les renforts nécessaires pour permettre aux praticiens de réaliser les missions sanitaires prévues dans cette stratégie d'éradication rapide d'une maladie exotique, jusqu'ici jamais rencontrée en France.

Pour faciliter le travail de chacun, nous avons mis à disposition des contrats de travail prêts à l'emploi et notre service juridique a répondu aux questions les plus précises qui se posaient sur le terrain. Parallèlement, nous avons engagé les négociations tarifaires indispensables pour garantir la rémunération des actes réalisés.

La SNGTV a assuré de son côté l'appui scientifique et technique, en lien avec les GDS3, afin de diffuser une information fiable et en temps réel aux consoeurs et confrères. Enfin, chacun a pris sa part : le Conseil de l'Ordre (Auvergne-Rhône-Alpes), par exemple, a facilité l'inscription d'étudiants et la réinscription de vétérinaires retraités venus renforcer les équipes. C'est cette complémentarité des rôles qui a permis une réponse rapide et structurée.

D.V. : Des tensions relationnelles avec certains éleveurs sur le terrain, réticents à certaines mesures prophylactiques (abattage total notamment), sont apparues dès la découverte des premiers foyers. Quelle a été l'action du SNVEL pour prévenir ces tensions, voire répondre à certaines dérives ?

D.Q. : Dès les premières opérations sur le terrain, des tensions sont apparues avec certains éleveurs, parfois réticents aux mesures comme l'abattage total (qui rappelons-le n'est pas tout à fait total puisqu'il respecte les unités épidémiologiques, c'est-à-dire les lots) mais pas seulement (certains éleveurs ne sont pas en accord avec la vaccination mais ça reste à la marge).

Nous participions quotidiennement à des points avec le ministère, la SNGTV et les GDS. Cela permettait de faire remonter les difficultés et d'adapter les réponses en temps réel, dans un souci constant d'agilité et de pragmatisme.

Nous avons évidemment dénoncé les agressions dont ont pu être victimes certains confrères et consoeurs, ce qui est inacceptable. C'est dans ce contexte que j'ai pris l'initiative d'une lettre ouverte il y a plusieurs jours (lire à l'adresse https://tinyurl.com/ 2dt283ez) : elle visait à rappeler à tous la nécessité de retenue dans les propos, car certaines paroles, parfois prononcées sans mauvaise intention, pouvaient renforcer la contestation de la stratégie sanitaire et la mise en danger de ceux qui étaient au front et qui ne vivaient pas bien certains discours.

Cette stratégie avait pourtant été validée à la quasi-unanimité du Cnopsav4 (https://tinyurl.com/3yuzvtpk), y compris par certains acteurs qui l'ont ensuite contestée publiquement.

Mon message était simple : il est normal et même souhaitable qu'un débat ait lieu mais le temps de la controverse doit venir après la crise, pas pendant. Quand l'incendie fait rage, il faut d'abord l'éteindre et discuter ensuite pour savoir s'il y avait une meilleure façon de le combattre. Et le tout, rappelons-le, avec des réglementations européennes qui s'imposent, quoi qu'on en dise...

D.V. : L'impact des maladies émergentes ou non affectant les filières d'élevage semble aller crescendo ces dernières années. Quelle réponse selon vous faudrait-il apporter en termes de prévention et de lutte à une échelle plus globale ?

D.Q. : On voit bien que les crises sanitaires sont appelées à se multiplier. Les épisodes récent (IAHP5, FCO6, MHE7... et maintenant DNC). La réponse est dans le renforcement du rôle des vétérinaires de terrain.

Cela repose notamment sur les dossiers que nous menons depuis plusieurs années déjà :

- la pérennité du maillage vétérinaire auprès des animaux de rente,

- la réforme du suivi sanitaire permanent,

- et, surtout, la rémunération adéquate des missions sanitaires en temps « de paix ».

Ce que nous défendons, c'est une logique de prévention et d'anticipation.

Pour être efficaces en cas de crise, il faut que des vétérinaires soient présents, formés et disponibles. Or cela suppose de reconnaître aussi la valeur de leur vigilance quotidienne et pas uniquement leur action ponctuelle au moment d'une crise.

La comparaison avec les pompiers est parlante : personne n'imaginerait aujourd'hui de ne rémunérer les pompiers que lorsqu'ils sortent de la caserne. Leur présence, leur disponibilité et leur préparation ont un coût qu'il faut assumer collectivement.

Pour les vétérinaires, c'est exactement la même logique : si l'on n'assure pas cette base, le jour où survient une crise, il n'y aura tout simplement plus de force d'intervention suffisante.

1 SNVEL : Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral.

2 SNGTV : Société nationale des groupements techniques vétérinaires.

3 GDS : Groupement de défense sanitaire.

4 Cnopsav : Comité national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale.

5 IAHP : influenza aviaire hautement pathogène.

6 FCO : fièvre catarrhale ovine.

7 MHE : maladie hémorragique épizootique.


Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1762

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